Les financements utilisés par l’entreprise sont décrits, dans une approche comptable, au passif du bilan de la société. On y découvre les sources
principales du financement que sont les capitaux propres et les capitaux empruntés.
La notion de structure financière de l’entreprise s’intéresse à la répartition de ces ressources mises à disposition de l’entreprise selon leur
nature. Au sens strict, la notion se réfère à l’ensemble des ressources inscrites au passif du bilan et l’on parle de structure du capital pour ne faire référence qu’à la
répartition des ressources stables (capitaux propres et dettes financières à long terme), mais les deux expressions sont souvent confondues.
Les dirigeants de l’entreprise ont-ils avantage à privilégier une source de financement par rapport à une autre ?
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----------------------------------La réponse dépend a priori du coût de chacune des sources de financement utilisées et de leur impact sur le coût moyen des financements ou coût
du capital. Elle dépend donc a priori aussi de l’utilisation en plus ou moins grande quantité d’une source de financement par rapport à l’ensemble des ressources
mises à disposition de l’entreprise.
Ce n’est pourtant pas la première question à se poser : le choix des financements n’a, en effet, d’importance que s’il affecte les décisions de
l’entreprise.
La structure du capital a-t-elle une influence sur la prise décision de l’entreprise ?
Si la réponse est négative, les choix de financements n’ont pas de conséquence sur la valeur de l’entreprise et la richesse des actionnaires.
Ce n’est que sous la condition d’une réponse positive à cette question que l’on s’intéresser au partage optimal des sources de
financement entre capitaux propres et capitaux empruntés.
Pour obtenir des éléments de réponse, nous commencerons par aborder la « mécanique » induite par les financements sélectionnés, c’est-à-dire leurs
conséquences en terme de rendement et de risque du point de vue de l’actionnaire. La présentation des arguments en faveur ou à l’encontre de la neutralité de la structure
financière sera suivie d’autres approches pouvant justifier ou expliquer certains choix dans les entreprises. Pour finir, nous aborderons certains aspects pratiques
concernant l’analyse de la structure financière.
2. Les enjeux du choix des moyens de financement
L’analyse du choix des moyens de financement et de ses conséquences ne peut raisonnablement s’effectuer qu’au
regard d’un certain nombre de variables caractéristiques de ces moyens de financement et des circonstances de ce choix.
Parmi ces variables, on peut citer :
– le coût du capital, ou coût moyen des différentes sources de financement compte tenu de l’utilisation qui en est faite;
– la disponibilité des financements, à un moment donné;
– l’accessibilité de ces sources de financement, pour une entreprise donnée;
– le désir, plus ou moins contraignant, des actionnaires à rester indépendants.
Ces variables représentent autant de contraintes susceptibles d’influencer la décision finale. Elles ne doivent pas cependant conduire les
dirigeants à ignorer le regard que porte l’actionnaire sur les choix mis en oeuvre dans l’entreprise. Elles ne peuvent donc masquer l’importance des deux critères caractérisant
ce regard de l’actionnaire que sont le rendement et le risque.
2.1. La dimension rendement du choix des moyens de financement
Les propriétaires de l’entreprise confient des ressources à celle-ci et délèguent la gestion de ces ressources aux dirigeants sous la contrainte
que leur exigence, en terme de rémunération des risques qu’ils supportent, soit satisfaite.
La rémunération des propriétaires de l’entreprise provient du résultat net qui dépend, d’une part, des résultats de l’activité économique de
l’entreprise et, d’autre part, de ce qu’il en reste après rémunération des éventuels autres apporteurs de capitaux comme les créanciers.
La rentabilité offerte aux actionnaires est par conséquent fonction de l’efficacité des moyens mis en oeuvre par l’entreprise pour mener à bien
son activité économique et de l’origine de ces moyens.
La rentabilité économique de l’entreprise
La rentabilité économique est un ratio confrontant les moyens engagés dans l’activité économique de l’entreprise (l’Actif EConomique, que nous
noterons AEC) avec le résultat généré par cette activité économique (le Résultat EConomique que nous noterons REC).
Le résultat économique est essentiellement déterminé par l’ensemble des produits et charges d’exploitation et doit aussi tenir
compte des autres éléments conduisant au résultat de l’entreprise à l’exception de toute rémunération des moyens de financement (charge financière d’intérêt) et des produits et
charges exceptionnels (ils ne sont pas
représentatifs des caractéristiques fondamentales de l’entreprise).
L’actif économique est formé des immobilisations nettes (retraitées, ie y compris celles financées par crédit bail et qui
n’apparaissent donc pas au bilan), du besoin en fonds de roulement et des autres variables constituant l’actif circulant. En bonne orthodoxie financière, l’actif économique a
pour contrepartie le capital financier (CF) formé des capitaux propres (CP) et des dettes financières (DF), y compris le crédit bail.
Hors prise en compte de l’impôt sur les sociétés, le taux de rentabilité économique
(re), ou taux de rentabilité des actifs de l’entreprise, est obtenu de la manière suivante :
r = REC
e AEC
La prise en compte de l’impôt sur les sociétés (à un taux noté IS) dû au titre des revenus de l’activité économique s’effectue soit en prenant
dans la formule précédente un résultat économique après impôt, REC*(1 – IS), soit en calculant directement
re après impôt = re*(1 – IS).
Exemple :
La société JEAN GRANGES SA génère un résultat économique de 10 140 000 euros. L’actif économique de la société étant estimé à 40 560 000
euros, le taux de rentabilité économique est égal à
r = 10 140 000 = 0,25
e 40 560 000
soit 25% avant impôt.
Après déduction de l’impôt déterminé au taux de 33,33% la rentabilité économique après impôt est
0,25*(1 – 0,3333) = 16,67%.
Compte tenu des moyens engagés, l’activité de l’entreprise génère 16,67% de revenus avant prise en compte de la rémunération des ressources
financières utilisées.
La rentabilité des capitaux propres
Si l’activité économique génère de la rentabilité, il reste à savoir ce qui revient aux actionnaires compte tenu, cette fois, des capitaux
propres dont l’entreprise dispose.
Les actionnaires ont un droit sur les bénéfices, c’est-à-dire un droit sur le résultat net (RN) de l’entreprise. Ce résultat
net, qui n’est que théorique puisqu’on a décidé de ne pas tenir compte des éléments exceptionnels, est obtenu à partir du résultat économique en déduisant les charges
financières d’intérêt rémunérant les créanciers lorsque l’entreprise s’endette (si le REC est exprimé après impôt, il faut déduire les charges financières nettes d’impôt ;
sinon, il est nécessaire de déduire également le montant de l’impôt du solde REC – charges financières).
Etant propriétaires des capitaux propres, la rentabilité qu’offre l’entreprise à ses actionnaires est déterminée par la
rentabilité des capitaux propres (rcp), évoquée de
plus en plus souvent sous son nom anglo-saxon ROE (pour « Return On Equity ») :
rCP
= RN CP
D’un côté, par la présence d’une charge financière d’intérêt, l’utilisation de la dette diminue le résultat net. De l’autre, le recours à
l’endettement par l’entreprise limite la contribution des actionnaires au financement de l’actif économique. La rentabilité des capitaux propres peut donc être affectée par le
choix de sources de financement diversifiées.
Cas d’un financement de l’actif économique par capitaux propres
Exemple :
Puisque l’actif économique a pour contrepartie le capital financier et que celui-ci n’est composé dans ce cas que de capitaux propres, le
montant des capitaux propres de la société JEAN GRANGES SA est égal à 40 560 000 euros. De par l’absence de dette, le calcul du résultat net est le suivant :
RN = REC*(1 – IS) = 10 140 000 * (1 – 0,3333), soit 6 760 338 euros. La rentabilité des capitaux propres est alors égale à
rCP
= 6 760 338
40 560 000
= 0,1667
soit 16,67%.
Lorsque le financement de l’entreprise ne provient que des capitaux propres, le taux de rentabilité des capitaux propres est égal au taux de
rentabilité économique.
Cas d’un financement mixte de l’actif économique
Exemple :
Le capital financier de la société JEAN GRANGES SA est toujours estimé à 40 560 000 euros mais il est composé en partie, cette fois, de
capitaux empruntés pour un montant de 18 252 000 euros. Le montant des capitaux propres est donc de 22 308 000 euros.
La dette porte intérêts au taux de 6%, ce qui représente une charge financière de 1 095
120 euros.
Détermination du résultat net :
REC | 10 140 000 |
– charge financière | 1 095 120 |
Résultat avant impôt | 9 044 880 |
– impôt | 3 014 658 |
Résultat net | 6 030 222 |
La rentabilité des capitaux propres ressort égale à
rCP
= 6 030 222
22 308 000
= 0,27
soit 27%.
On constate que la rentabilité des capitaux propres est passée de 16,67%, dans le cas d’un financement sans dette, à 27% dans le cas d’un
financement avec dette.
Le levier financier de la dette
Le levier financier représente la modification, favorable ou non, que subit la rentabilité des capitaux propres de par l’usage de la dette dans
les moyens de financement de l’entreprise.
En analyse financière, on sait que l’effet de la dette joue favorablement ou non selon que le taux de rentabilité économique est supérieur ou non
au coût de la dette (ki).
re > ki effet de levier favorable
re < ki effet de levier défavorable
Exemple :
L’effet de levier a joué favorablement pour la société JEAN GRANGES SA.
Le coût de la dette est ki = 6%*(1 – 0,3333) = 4%, alors que la rentabilité économique est de 16,67%.
On sait également que la rentabilité des capitaux propres expliquée à partir de l’approche par le levier financier se calcule ainsi :
r = r
+ (r
– k ) × DF
CP e
e i CP
Exemple et interprétation :
Dans le cas où la société JEAN GRANGES SA a recours à l’endettement,
rCP
= 0,1667 + (0,1667 – 0,04) × 18 252 000 = 0,27
22 308 000
soit 27%.
Autrement dit, la contribution des actionnaires au financement de l’entreprise est de 22
308 000 euros. Chaque euro investi dans l’entreprise génère 16,67% de revenu (après impôt) du simple fait de l’activité économique de
l’entreprise, soit au total 22 308 000 *
16,67% = 3 718 743,60 euros.
Le supplément de rentabilité capturé par les actionnaires (27% au lieu de ces 16,67%)
provient de ce que l’entreprise utilise la dette comme autre source de financement ;
Chaque euro emprunté pour financer en complément l’activité économique rapporte également 16,67% de revenus (après impôt) soit un total de
18 252 000 * 16,67% =
3 042 608,40 euros de revenu supplémentaire.
Une partie de ce supplément de revenu sert à rémunérer les créanciers puisque chaque euro emprunté et investi dans l’activité économique de
JEAN GRANGES SA coûte à l’entreprise 4% (après impôt), soit un total de 18 252 000 * 4% = 730 080 euros.
Dans la mesure où chaque euro emprunté et investi rapporte plus qu’il ne coûte, les actionnaires vont bénéficier de l’autre partie de ce
revenu supplémentaire (3 042 608,40
– 730 080 = 2 312 528,40 euros) : ils perçoivent un total de 3 718 743,60 + 2 312
528,40 = 6 031 263 euros conduisant à une rentabilité des capitaux propres de 27%. (Attention : les petites différences entre cette
estimation du résultat net revenant aux actionnaires et celle obtenue précédemment sont dues aux différences d’arrondis lorsque
le calcul de l’impôt est effectué sur le solde REC – charge financière ou séparément sur
chacun de ces élément).
On remarquera que l’approche qui vient d’être conduite ici n’est qu’une représentation comptable du levier financier : les capitaux propres et la
dette financière sont mesurés par leur valeur au bilan. On verra plus en avant que la portée du problème n’est pas tout à fait la même si ces variables sont exprimées en valeur
de marché.
2.2. La dimension risque du choix des moyens de financement
Le risque supporté par les propriétaires de l’entreprise a deux origines :
– d’une part, le risque d’exploitation (ou risque économique), lié à l’activité de l’entreprise, qui se traduit par la possibilité d’une
plus ou moins forte variation du résultat économique lorsque le niveau d’activité de l’entreprise (que l’on peut mesurer par le chiffre d’affaires) varie. Il dépend de
la présence et de l’importance de charges fixes nécessaires au fonctionnement de l’entreprise (si une entreprise supporte des charges fixes plus importantes que ses
concurrentes de taille similaire, elle est incitée à réorganiser son fonctionnement pour éliminer les charges superflues et pouvoir présenter un niveau de risque comparable à
celui de ses concurrentes) . Plus ces charges fixes sont élevées, plus la contrainte sur le chiffre d’affaires est importante pour arriver à générer un résultat économique
positif. Une baisse de chiffre d’affaires provoque alors une plus forte dégradation du résultat économique que si la société ne supportait que peu de charges fixes.
– D’autre part, le risque financier lié à la manière dont l’entreprise se finance. Selon la même logique que précédemment, avec
l’endettement, les charges financières d’intérêt augmentent et contraignent plus fortement les possibilités de générer un résultat net positif. Ce risque financier provient de
ce que la rémunération de la dette est prioritaire par rapport à la rémunération des capitaux propres et diminue celle-ci.
Exemple :
Selon que la société JEAN GRANGES SA se finance ou non en partie par la dette, la situation est la suivante
Financement | par capitaux propres | par capitaux propres et dettes |
REC | 10 140 000 | 10 140 000 |
Charge financière | – | 1 095 120 |
Résultat courant | 10 140 000 | 9 044 880 |
Impôt | 3 379 662 | 3 014 658 |
Résultat Net | 6 760 338 | 6 030 222 |
rCP | 16,67% | 27% |
Si le risque économique conduit, pour une raison ici indéterminée, à réduire de moitié le résultat économique, les conséquences sont plus
fortes pour les capitaux propres
lorsque l’entreprise est endettée :
Financement | par capitaux propres | par capitaux propres et dettes |
REC | 5 070 000 | 5 070 000 |
Charge financière | – | 1 095 120 |
Résultat courant | 5 070 000 | 3 974 880 |
Impôt | 1 689 831 | 1 324 827 |
Résultat Net | 3 380 169 | 2 650 053 |
Une baisse de 50% du résultat économique a entraîné une baisse de 50% du résultat net si l’entreprise n’est pas endettée ; la baisse du
résultat net est en revanche de 56% si l’entreprise se finance par la dette.
La présence d’un financement par dette n’augmente pas le risque économique mais ajoute un risque financier dont la manifestation se traduit par
le fait que chaque unité de capital supporte une part plus grande de risque économique.
Constatant ce risque, les actionnaires vont, en compensation, accroître leur exigence de rémunération.
L’endettement permet à l’entreprise, sous certaines conditions, de faire jouer l’effet de levier financier en faveur d’une meilleure rentabilité
des capitaux propres. Cependant, la présence de dette augmente le risque total supporté par les actionnaires en introduisant ou en augmentant le risque financier.
Les deux effets peuvent apparaître cohérents et ne pas affecter la situation des actionnaires. Ils peuvent aussi faire apparaître une distorsion
telle que la compensation supplémentaire exigée par les actionnaires n’est pas obtenue. Il est donc nécessaire d’aborder la question de la neutralité ou non des choix de
financement de l’entreprise.
3. A la recherche de la structure financière optimale
La quête d’une structure financière optimale a pour point de départ la question de la neutralité ou non du choix de financement sur la situation
des actionnaires.
L’effet de l’endettement de l’entreprise sur le rendement des capitaux propres et le risque supporté par les actionnaires nous impose une
contrainte : on ne peut raisonner qu’à situations comparables, ce qui en bon langage financier signifie que l’on doit comparer la situation des actionnaires, selon la présence
ou non de dettes, à niveau de risque équivalent.
L’analyse nécessite des critères de comparaison : en se plaçant du point de vue des propriétaires de l’entreprise,
un premier critère est naturellement celui de la maximisation de la richesse des actionnaires. En considérant l’ensemble des actionnaires de l’entreprise, ce
critère correspond à la maximisation de la valeur de l’entreprise. Or, la valeur de l’entreprise, selon la logique du marché, est fonction des flux de rémunération
qu’elle peut générer dans le futur et ces flux seront d’autant plus importants que le coût des différentes sources de financement est faible. La
minimisation du coût moyen pondéré du capital (CMPC), ou coût du capital, est donc l’autre critère permettant d’apprécier les décisions de l’entreprise en matière de
financement.
Face à un problème si complexe, il est habituel de démarrer l’analyse en procédant un certain nombre de simplifications : hypothèses de
marchés parfaits, sans coût de transaction ni impôt et hypothèse que les entreprises et les individus peuvent s’endetter au même taux d’intérêt et que ce taux n’est pas
affecté par le montant de l’endettement (absence de risque de défaillance). Ce choix facilite les comparaisons à niveau de risque équivalent : l’actionnaire d’une société
endettée est confronté à la fois au risque économique de l’entreprise et à son risque financier. En l’absence de dette, il n’est confronté qu’au risque économique mais
puisque l’actionnaire a la possibilité de s’endetter à titre personnel et à un même taux d’intérêt que celui de l’entreprise, il peut décider de supporter à titre personnel
un risque financier.
En effet, le risque économique est indépendant du choix de financement de l’entreprise et le risque financier supporté par un actionnaire est
équivalent si le montant qu’il investit dans une entreprise non endettée provient, par exemple, à 60% de sa propre richesse et que les 40% restant proviennent de son endettement
personnel, ou s’il décide de n’investir que sa propre richesse dans une entreprise (de même risque économique) financée à 60% par capitaux propres et à 40% par la dette.
Partant de ce constat, Modigliani et Miller, lauréats du prix Nobel d’économie pour leur
contribution à ce débat, envisagent les possibilités d’arbitrage (entre investir dans une entreprise endettée ou une entreprise sans dette) que
peuvent mettre en œuvre les actionnaires selon la valorisation des entreprises sur le marché.
Après une présentation des leçons à tirer de cette analyse dans un mode sans impôt, nous présenterons les conséquences du relâchement de
certaines des hypothèses simplificatrices.
3.1. Les leçons tirées de la neutralité de la structure financière dans un monde sans impôt
Dans ce monde simplifié, Modigliani et Miller (MM) montrent que l’on ne peut pas accroître la valeur de l’entreprise en modifiant la manière dont
elle est financée.
Leur présentation est appelée avec amusement la « théorie de la pizza » en référence à l’exemple pris par Merton H. Miller lorsqu’il eu à
expliquer devant les caméras de télévision les raisons de son prix Nobel : on lui demanda de résumer toute une vie de travail en 10 secondes au maximum sans aucun vocabulaire
technique ni académique ! La seule solution qu’il ait trouvé a été de comparer une entreprise à une pizza pour expliquer qu’en découpant un plus grand nombre de morceaux (4, 8,
ou 16, etc.), on ne dispose que de plus de parts mais pas plus de pizza. Autrement dit, ce qui importe est la taille de la pizza (la valeur des actifs de l’entreprise et donc
les flux de liquidités futurs que l’entreprise va générer) et non le nombre de parts à distribuer (le nombre de catégories de financements utilisés).
Pour illustrer cela, ils nous faut raisonner à partir de la valeur totale de l’entreprise sur le marché (valeur de marché de son capital
financier ou encore valeur de marché de ses actifs) qui est estimée par la somme : valeur de marché des capitaux propres + valeur de marché de la dette
Exemple :
Prenons le cas de la société BARTOK financée entièrement par capitaux propres et dont le capital est composé de 200 000 actions cotées 4
euros sur le marché. La capitalisation boursière de la société, ou valeur de marché de ses capitaux propres, est donc de 200
000 * 4 = 800 000 euros. Comme l’entreprise ne fait pas appel à d’autres sources de financement ces 800 000 euros représentent aussi la
valeur de marché de ses actifs.
Supposons que l’entreprise BARTOK génère chaque année un résultat économique de 48
000 euros (il n’y a donc pas de croissance de l’activité ni de modifications de la façon dont elle fonctionne ; cette hypothèse simplifie les
calculs. Se reporter si besoin par la suite au chapitre 2, pages 40 et 41, de l’ouvrage de référence). Sa rentabilité économique est égale à 48 000 / 800 000 =
6%.
Comme l’entreprise ne supporte ni charge financière (pas de dette), ni impôt, la rentabilité des capitaux propres est aussi égale à 6% (sous
ces hypothèses, le résultat net est égale à 48 000 euros ; comparé aux 800 000 de capitaux propres, cela nous donne : rCP est égal à 6%).
Remarque : dans le cas d’une croissance nulle de l’entreprise, le coût des capitaux propres (kc) est calculé par le ratio «
BPA / cours de l’action » représentant le taux de capitalisation des capitaux propres, où BPA signifie bénéfice par action (résultat net divisé par le nombre d’actions). Ici, le
BPA est égal à 48 000 / 200 000 = 0,24 euro. Le coût des capitaux propres est donc 0,24 / 4 = 6%. La rentabilité offerte aux actionnaires (rCP) correspond à la
rentabilité exigée par les actionnaires.
Considérons maintenant que cette même entreprise envisage de modifier sa structure financière sans pour autant modifier le niveau de son
activité économique : elle décide de financer son actif économique en partie par la dette et donc de remplacer une part des capitaux propres par des capitaux empruntés.
L’opération consiste à s’endetter pour un montant de 400 000 euros (valeur de marché et valeur nominale), au taux de 4%, pour ensuite racheter ses propres actions et les
détruire. Les actions étant cotées 4 euros, avec le montant emprunté elle peut racheter 400 000 / 4 = 100 000 actions. Il ne restera donc en circulation que 200 000 – 100 000 =
100 000 actions composant le capital de l’entreprise.
Dans la mesure où le résultat économique reste inchangé, les variables caractéristiques de la société sont les suivantes :
Résultat économique 48 000
– charge financière (400 000 * 0,04) 16 000
Résultat Net (RN) 32 000
Nombre d’actions 100 000
BPA 0,32
BPA/cours de l’action (0,32/4) 8% (coût des capitaux propres, kc)
Quelle est la valeur de l’entreprise ?
La valeur de la dette est de 400 000 euros. La valeur des capitaux propres est obtenue
– Soit en actualisant les flux futurs de l’entreprise au coût des capitaux propres :
avec l’hypothèse de croissance nulle, le calcul est RN / kc = 32 000 / 0,08
– soit en déterminant la capitalisation boursière : 100 000 actions à 4 euros
Pour les deux calculs, la valeur des capitaux propres est égale à 400 000 euros.
Conclusion :
lorsque l’entreprise BARTOK ne se finançait que par capitaux propres, la valeur de l’entreprise était de 800 000 euros.
En remplaçant une partie des capitaux propres par de la dette, la valeur de l’entreprise est
Valeur des capitaux propres | 400 000 |
+ Valeur de la dette | 400 000 |
= Valeur de l’entreprise | 800 000 |
PROPOSITION I de Modigliani et Miller :
Dans un monde sans impôt, la valeur de l’entreprise n’est pas affectée par la manière dont elle se finance (mais par l’aptitude de ses actifs
à produire de la richesse).
Coût du capital et coût des capitaux propres
Selon que l’entreprise BARTOK décide ou non de faire appel à un financement par dette, le rendement de ses capitaux propres, c’est-à-dire le coût
de ses capitaux propres, est changé : de 6% de rentabilité en l’absence de dettes, il passe à 8% lorsque l’entreprise est endettée.
Du point de vue des mécanismes de l’entreprise, le levier financier a joué.
Du point de vue du regard des actionnaires, la rentabilité exigée a été augmentée pour compenser l’apparition d’un risque financier.
PROPOSITION II de Modigliani et Miller :
Dans un monde sans impôt, le coût des capitaux propres augmente proportionnellement au ratio Dettes / Capitaux propres, exprimé en valeur de
marché. EN revanche, le coût du capital est invariant par rapport à la structure financière adoptée.
L’évolution de coût des capitaux propres en fonction de l’endettement est décrite par une formule similaire à celle de l’effet de levier. En
notant D la valeur de marché de la dette ( au taux d’intérêt i) et C la valeur de marché des capitaux propres,
k c = re
+ (re
– i) × D C
Pour une entreprise non endettée (D = 0), le coût des capitaux propres est égal au taux de rendement des actifs.
Exemple :
Pour la société BARTOK,
8% = 6% + (6% – 4%) × 400 000
400 000
Qu’en est-il du coût moyen pondéré du capital, ou coût du capital ?
Lorsque BARTOK est financée entièrement par capitaux propres, son coût du capital (k)
correspond au coût des capitaux propres : 6%.
Lorsqu’elle est financée en partie par la dette,
k = kc × C
+ i × D
= 0,08 × 400 000 + 0,04 × 400 000 = 0,06
soit 6%.
C + D
C + D
800 000
800 000
L’argument d’arbitrage
Rappelons qu’une opération d’arbitrage réalisée sur le marché consiste à profiter des écarts de prix observés sur le marché de manière à capturer
un profit certain sans supporter de risque supplémentaire et sans apporter de ressources supplémentaires.
Que se passerait-il si le marché valorisait différemment deux sociétés comparables, c’est-à-dire de même taille et ayant la même activité
économique (donc, un actif économique d’un même montant) ?
Exemple :
Reprenons le cas de la société BARTOK à son début, lorsqu’elle n’était financée que par capitaux propres. Son concurrent direct est
l’entreprise GEMDET qui préfère financer son actif économique en partie par la dette.
Les deux entreprises génèrent le même résultat économique et offrent, de ce fait, la même rentabilité économique.
GEMDET est endettée pour un montant de 300 000 euros (valeur de marché et valeur nominale) au taux d’intérêt de 4% l’an. La valeur sur le
marché de ses capitaux propres est néanmoins de 530 000 euros, ce qui a pour conséquence que la valeur de l’entreprise GEMDET est supérieure à celle de BARTOK :
BARTOK | GEMDET | |||
Valeur des capitaux propres | 800 000 | 530 000 | ||
Valeur de la dette | – | 300 000 | ||
Valeur de l’entreprise | 800 000 | 830 000 | ||
Résultat économique | 48 000 | 48 000 | ||
– charge financière | – | 12 000 | ||
Résultat NetrCP | 48 000 | 6% | 36 000 | 6,8% |
Un actionnaire de GEMDET détenant 10% du capital, soit un portefeuille d’actions de 53
000 euros, perçoit une rémunération annuelle de 6,8% * 53 000 = 3 604 euros.
A-t-il un avantage financier quelconque à se désengager de l’entreprise GEMDET pour lui préférer l’entreprise BARTOK ?
Notre individu peut vendre ses actions GEMDET sur le marché et encaisser 53 000 euros qu’il peut réinvestir dans les actions BARTOK.
Cependant, comme cela a déjà été expliqué, il lui faut raisonner à risque identique. Le risque économique des deux sociétés étant similaire, il ne peut comparer un
investissement dans les actions BARTOK qu’en maintenant constant le risque financier qu’il supporte pour l’instant avec GEMDET. Comme BARTOK ne fait supporter aucun risque
financier à ses actionnaires, notre individu envisage de s’endetter à titre personnel.
Dans l’entreprise GEMDET, le risque financier provient d’une dette de 300 000 euros pour 530 000 euros de capitaux propres. Notre
individu va donc respecter ces proportions et emprunter à sa banque 30 000 euros puisque sa part des capitaux propres a une valeur de 53 000 euros. Il paie 4% d’intérêt sur
cet emprunt, soit 1 200 euros par an.
Disposant du montant de la vente de ses actions GEMDET et du montant emprunté auprès de sa banque, notre individu peut maintenant investir 53
000 + 30 000 = 83 000 euros dans les actions BARTOK. Compte de la rentabilité des capitaux propres de cette entreprise, ce placement lui rapporte 6% * 83 000 = 4 980 euros par
an. Déduction faite des intérêts qu’il paie à sa banque, son gain net est de 4 980 – 1 200 = 3 780.
A niveau de risque identique, puisqu ‘il réplique à titre personnel la structure financière de GEMDET, il perçoit de son placement une
rémunération supérieure aux 3 604 euros qu’il percevait auparavant. La rentabilité de ses propres capitaux est maintenant de 3
780 / 53 000 soit un peu plus de 7,1%.
Intrigués par le sourire que peut afficher notre individu à l’issue d’une si belle opération, les actionnaires de GEMDET prennent alors
conscience de l’opportunité d’arbitrage qui s’offrent à eux et agissent de même. La pression à la vente observée sur les actions GEMDET devrait entraîner une baisse du cours de
l’action. Autrement dit, une diminution de la valeur des capitaux propres qui conduit à réduire la valeur de l’entreprise. A l’inverse, la pression à l’achat observée sur les
actions BARTOK provoque une hausse de
leur cours boursier ; cette augmentation de la valeur des capitaux propres conduit à une hausse de la valeur de l’entreprise.
La valeur des deux entreprises convergent vers un niveau tel que l’opportunité d’arbitrage est éliminée. La différence de
valorisation entre BARTOK et GEMDET est ainsi corrigée par le marché et leur choix de financement respectif n’a plus d’incidence.
3.2. La structure financière optimale dans un monde avec impôt
.
Modigliani et Miller n’ignorent pas que la rémunération des financements par dette procure à l’entreprise une économie d’impôt et que cet
avantage crée de la valeur.
Aussi, dans un deuxième temps, ils ont analysé les conséquences de l’impôt sur le choix d’une structure financière.
Le rôle de l’économie d’impôt liée aux intérêts de la dette
Cas d’un financement de l’actif économique par capitaux propres, en présence d’impôt sur le revenu des sociétés
Exemple :
La société BARTOK paie 34% d’impôt sur les bénéfices. En l’absence de financements autres que les capitaux propres, sa situation est la
suivante :
Résultat économique 48 000
– Impôt à 34% 16 320
Résultat Net 31 680
La valeur de l’entreprise reste inchangée puisque l’on sait que dans ce cas la rentabilité des capitaux propres est égale à la rentabilité
économique exprimée après impôt (ou rendement requis sur les actifs de l’entreprise). En effet,
re avant impôt = 6%
re après impôt = 6% * (1 – 34%) = 3,96%. En l’absence de dette, rCP = 3,96%. La valeur des capitaux
propres, toujours estimée par l’actualisation des flux de
l’entreprise (31 680 ; croissance nulle) à ce taux, est égale à 31 680 / 0,0396 = 800000 euros.
Cas d’un financement mixte de l’actif économique, en présence d’impôt sur le revenu des sociétés
Exemple :
Lorsque la société BARTOK se finance en partie par la dette, l’impact de la charge financière d’intérêt est allégé du fait de l’économie
d’impôt. On notera que la charge d’intérêt étant de 4%*400 000 = 16 000 euros chaque année, en supposant que l’entreprise maintient son niveau d’endettement (dette perpétuelle),
l’économie d’impôt annuelle est de 34% * 16 000 = 5 440.
Le flux perçu chaque année par les actionnaires est le suivant,
Résultat économique | 48 000 |
– charge financière (400 000 * 4%) | 16 000 |
Résultat avant impôt | 32 000 |
– Impôt à 34% | 10 880 |
Résultat Net | 21 120 |
Compte tenu de l’endettement de BARTOK (400 000 euros), que l’on peut supposer constant dans le temps (dette perpétuelle), les créanciers
perçoivent chaque année des intérêts d’un montant de 16 000 euros.
La valeur de marché de l’entreprise BARTOK est égale à la valeur actuelle de ces deux catégories de flux. Cependant, comme le taux
d’actualisation à appliquer devrait être le coût moyen des financements et que l’on ne connaît pas celui des capitaux propres, il nous faut procéder autrement.
On remarquera que cet ensemble de flux versés par l’entreprise (et que doit permettre de générer l’actif économique), 21 120 + 16 000 = 37
120 euros, correspond au résultat économique après impôt augmenté de l’économie d’impôt que procure le financement
par dette : | ||
Résultat économique après impôt | 48 000 * (1 – 34%) = | 31 680 |
Economie d’impôt liée à la dette | 5 440 | |
Total | 37 120 |
Décomposé ainsi, l’actualisation devient possible : la première composante du flux étant générée par les actifs de l’entreprise, on peut
l’actualiser au taux de rentabilité économique après impôt. La deuxième composante concerne la dette et peut être actualisée au taux d’intérêt de la dette. La valeur de
l’entreprise BARTOK en présence de dettes est alors :
31 680 + 5440 = 800 000 + 136 000
= 936 000
3,96% 4%
Autrement dit,
Valeur de l’entreprise endettée =
Valeur de l’entreprise sans dette + Valeur actuelle de l’économie d’impôt
REC × (1 – IS )
|
*
c
IS × i × D
+ i
14243
IS×D
|
où k *
représente le coût des capitaux propres d’une entreprise sans dette (ainsi que le
rendement économique après impôt, de par l’absence de dette).
Ainsi :
la valeur d’une entreprise endettée est supérieure à celle d’une entreprise sans dette ;
le supplément de valeur correspond à la valeur actuelle de l’économie d’impôt due à la déductibilité des intérêts de la dette.
Que dire des conséquences de l’endettement sur le coût du capital ?
Exemple :
Connaissant maintenant la valeur de la société BARTOK avec endettement (936 000 euros) et connaissant la valeur de la dette (400 000 euros),
on en déduit facilement que la valeur des capitaux propres est 936 000 – 400 000 = 536 000 euros.
Compte tenu d’un résultat net de 21 120 euros , le coût des capitaux propres est donc
21 120 / 536 000 = 3,94%.
Le coût de la dette est, quant à lui, estimé à 4% * (1 – 34%) = 2,64%. Le coût moyen pondéré du capital est donc :
0,0394 × 536 000 + 0,0264 × 400 000 = 3,38%
936 000
936 000
L’endettement a permis de minimiser le coût du capital et de maximiser la valeur de l’entreprise.
La prise en compte des conséquences de l’impôt sur les sociétés conduit à éliminer l’hypothèse de neutralité des choix de financement. La
structure financière affecte la valeur de l’entreprise.
Malheureusement, l’approche suggère que la valeur de l’entreprise augmente tant que l’endettement augmente : la
structure financière optimale supposerait que les entreprises soumises à l’impôt sur les bénéfices ne se financent que par la dette ; la valeur minimale du coût du
capital serait alors le coût de la dette.
Cette situation n’est pas observée dans la réalité et n’apparaît pas très satisfaisante. Elle ne tient pas compte du caractère risqué de la dette
lorsque l’endettement devient important.
Les limites à l’endettement excessif : les coûts de faillite
L’entreprise fait face à un risque de défaillance lorsque son endettement devient trop important. La situation se manifeste d’abord par des
difficultés financières et peut aboutir à la mise en faillite.
Des signes annonciateurs de difficultés à venir vont nuire au développement harmonieux de l’activité de l’entreprise et les partenaires
économiques de l’entreprise peuvent être amenés à prendre des précautions : les fournisseurs, soucieux du bon encaissement de leurs factures, vont exiger des délais de paiement
plus courts ; du côté des clients, de plus en plus inquiets des capacités de l’entreprise à remplir ses engagements, ils auront tendance à délaisser l’entreprise au profit de
ses concurrentes.
Les performances de l’entreprise vont progressivement se dégrader avec une création de valeur amoindrie qui sera sanctionnée par les actionnaires
consacrant, dans la baisse de la valeur des actions, la baisse de la valeur de l’entreprise.
A ces coûts indirects (difficiles à estimer), s’ajoutent des coûts plus directs lorsque la faillite survient : frais de liquidation de
l’entreprise, comportant les frais judiciaires et les coûts de l’administration provisoire avant liquidation.
La théorie du compromis ou « Static trade-off theory » :
Elle offre deux avantages :
‰ concilier les différents résultats mis en évidence jusqu’à présent
‰ mettre en balance l’avantage fiscal de la dette avec l’inconvénient du risque de faillite pour arriver à la détermination d’un niveau
d’endettement optimal.
La structure financière optimale est par conséquent telle que l’économie d’impôt que procure le dernier euro emprunté est annihilée par les coûts
de faillite supplémentaires qu’il fait apparaître. Les coûts de faillite étant anticipés, c’est en les actualisant qu’ils interviennent dans l’évaluation de l’entreprise :
Valeur d’une entreprise endettée =
Valeur d’une entreprise sans dette
+ valeur actuelle de l’économie d’impôt liée à la dette
– valeur actuelle des coûts de faillite
La structure financière optimale, ou structure financière cible, est caractérisée par la valeur optimale du ratio dette / capitaux propres (D/C).
Si le ratio appliqué par l’entreprise est inférieur, l’entreprise n’a pas profité pleinement de l’avantage fiscal de la dette et sa valeur de marché pourrait être plus élevée.
Au delà du ratio cible, le risque
de faillite pénalise l’entreprise et diminue sa valeur de marché. Les décisions en terme de choix de financement ne sont donc pas neutres.
On considère et on observe que la structure financière optimale diffère selon les branches d’activité :
– les activités faisant que les entreprises disposent de nombreux actifs tangibles semblent offrir plus de garanties en cas de difficultés
(possibilité de les revendre pour régler des créanciers et éviter la cessation de paiement) ; les coûts de
faillite apparaissent plus faibles et autorisent un niveau d’endettement plus élevé.
– Les activités comportant beaucoup d’actifs intangibles offrent moins de garanties et les coûts de faillites apparaissent plus élevés. Le
niveau d’endettement reste faible malgré, le plus souvent, des besoins de financement très supérieurs au cas précédent.
A propos du coût du capital :
Ce coût du capital suppose de connaître le coût des capitaux propres, le coût de la dette (après impôt) et la structure financière qui permettra
de calculer la pondération de ces deux sources de financement. Le coût des capitaux doit tenir compte du risque supporté et sera donc estimé par le MEDAF (voir ci-après).
Lorsque le coût de la dette (comme nous l’avons précisé ensemble lors de ce module 1), n’a pas d’autre origine que le paiement des intérêts, il est estimé en multipliant le taux
auquel l’entreprise peut aujourd’hui emprunter par (1 – taux de l’impôt). La structure financière doit être celle qui minimise le coût du capital : ce cours sur la structure
financière démontre que le minimum est atteint lorsque la structure financière est optimale. Par conséquent, le coût du capital doit être calculé par rapport à cette structure
financière optimale dans la mesure où l’entreprise s’engage à respecter cet objectif. On parle alors de structure financière cible pour faire référence à ce niveau optimal
d’endettement (par rapport aux capitaux propres) que l’on s’engage à maintenir dans le temps (en dessous, l’avantage de l’endettement est insuffisamment exploité ; au-delà,
apparaissent des inconvénients représentés par l’anticipation de coûts de faillites probables).
A propos du MEDAF et du coefficient bêta:
C’est un modèle fondateur de la finance moderne qui décrit le rendement minimum exigé par les actionnaires compte tenu du risque auxquels ils
s’exposent en détenant les actions de l’entreprise. Intuitivement la logique du MEDAF est simple. En investissant dans les actions de la société, l’actionnaire espère gagner
plus que ce qu’il pourrait obtenir en plaçant son argent sans risque (et qui lui rapporterait le taux de rendement sans risque, Rf). Le supplément de
rémunération par rapport à ce taux sans risque est la prime de risque exigée pour investir dans cette société. Plus le risque est élevé, plus le supplément de
rémunération exigé sera important (le rendement exigé augmente avec le risque). Comment est donc déterminée cette prime
du risque pour la société concernée ? Elle d’abord fonction de la « quantité » de risque à laquelle sont exposés les actionnaires ; c’est le coefficient bêta ou coefficient de
risque systématique. Cette « quantité » (le bêta) est alors multipliée par le prix unitaire du risque tel qu’on peut l’estimer sur le marché des actions. Mais encore, me direz-
vous…
Quelle est la rémunération du risque sur le marché des actions ? Si on investi dans l’ensemble des sociétés cotées sur le marché au lieu
d’investir la même somme d’argent dans un placement sans risque et si le rendement espéré en moyenne pour le marché des actions est de 10% alors que celui d’un placement
sans risque est par exemple 4%, quel supplément de rémunération est donc lié à la prise de risque ? 4% sans risque mais 10% si je m’expose au
risque du marché : 10% – 4% = 6% est la prime de risque du marché, le supplément de rendement que je peux espérer en plaçant mon argent sur l’ensemble du marché des actions
au lieu de le placer sans risque. Considérons maintenant que je décide d’investir seulement dans quelques unes des sociétés cotées, voire une seule société : si ce placement
m’expose à autant de risque que pour le marché en moyenne, j’espère capturer un rendement au moins égal à 4% (sans risque)
+ la prime de risque du marché (même niveau de risque), soit 10% au total. Mais si ce placement m’expose à 2 fois plus de risque que le marché en
moyenne (la ou les sociétés sélectionnées sont plus risqués que la moyenne), il parait normal d’exiger une prime de risque 2 fois plus grande que celle du marché en moyenne ;
le rendement minimum exigé serait alors 4% (sans
risque) + 2 fois 6%, soit un total de 16% (rendement exigé pour un bêta égal à
2). Comme vous l’aurez compris maintenant, si la ou les sociétés sélectionnées ont un bêta égal à 0,25 cela signifie que le niveau de risque est
4 fois plus faible que celui du marché en moyenne (le bêta du marché est égal à 1 par définition) ; la prime de risque exigée sera 4 fois plus petite que celle du
marché c’est-à-dire 0,25×6% = 1,5%, et le rendement minimum exigé sera égal à 4% (sans risque) + 1,5% de prime de risque (pour un bêta égal à 0,25), soit 5,5%.
La notion de bêta économique et financier est une conséquence des travaux de Modigliani et Miller sur la structure financière en présence d’impôt
: en l’absence de dette, les actionnaires de l’entreprise ne sont exposés qu’à des risques liés à l’activité économique de la société : ils déterminent leur rendement exigé en
fonction du risque économique de la société. Lorsque l’entreprise est endettée, les actionnaires sont exposés non seulement à ce risque économique mais supportent en plus un
risque financier lié la présence d’une charge financière d’intérêt (à laquelle il faudra faire face quelque soit le résultat de l’activité économique). Plus la dette est
importante (relativement au montant des capitaux propres), plus ce risque financier est important. Autrement dit, les actionnaires d’une entreprise endettée déterminent
leur rendement minimum exigé en fonction du risque économique ET du risque financier. Plus l’entreprise est endettée, plus le risque global de l’entreprise augmente, plus le
rendement exigé sera important. Si le bêta mesure le niveau de risque auquel les actionnaires s’exposent, ce bêta doit tenir de la structure financière (D/C) de l’entreprise. Il
s’agit de préférence dans ce cas là de la structure financière cible (optimale).
Que faire alors ? D’abord, vérifier si le bêta qui vous est donné tient compte de cette structure financière cible. Si c’est le cas, il n’y a
rien d’autre à faire qu’utiliser ce bêta pour appliquer le MEDAF, etc…
Dans le cas contraire, le bêta disponible doit être ajusté en utilisant les formules données et appliquées. Lorsque le bêta disponible ne reflète
que le risque économique (bêta moyen du secteur d’activité par exemple), on introduit l’impact de l’endettement cible (D/C) de l’entreprise en multipliant ce bêta
économique par [1 + (1- taux de l’impôt)*D/C]. Le résultat nous donne le bêta économique et financier tenant compte de l’endettement cible de l’entreprise. Il
reste alors à appliquer le MEDAF, etc…
Si maintenant le bêta disponible tient compte de la structure financière actuelle de l’entreprise mais que celle-ci ne correspond pas à sa
structure financière cible (celle qu’elle envisage de respecter dans l’avenir), il faut passer par deux étapes : (i) éliminer l’impact de la « mauvaise » structure financière
en divisant ce bêta par [1 + (1- taux de l’impôt)*D/C] où D/C est ici la structure financière actuelle associée à ce niveau de bêta. Le résultat de ce calcul représente le bêta
économique de l’entreprise. (ii) introduire l’impact de la structure financière cible en multipliant ce bêta économique par [1 + (1- taux de l’impôt)*D/C] où cette fois-ci D/C
correspond à la structure financière cible. Le résultat est ensuite utilisé pour appliquer le MEDAF, etc…
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